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Martha Wainwright à l’aide de l’Académie Centennial
Martha Wainwright à l’aide de l’Académie Centennial

Ce n’est pas un lundi après-midi comme les autres dans le local de musique de l’Académie Centennial, située au centre-ville, rue Sherbrooke Ouest. On répète avec des élèves en vue d’un spectacle-bénéfice qui aura lieu le 7 juin au National avec un autre invité de marque, Rufus Wainwright.

Ce n’est pas la première fois que les trois autrices-compositrices-interprètes partagent la scène : elles l’ont fait de nombreuses fois, des plaines d’Abraham à la Maison symphonique. C’est toutefois un privilège de les voir réunies au sous-sol d’une école dont les élèves ont des difficultés d’apprentissage.

Il y a plusieurs mois, quand Martha Wainwright a discuté d’une collecte de fonds avec la direction de l’école de son fils, il fallait se rendre à l’évidence : ce n’est pas en cuisinant qu’elle pouvait s’impliquer le mieux comme parent, mais en organisant un « concert de gang », comme elle le fait chaque année avant Noël avec son frère Rufus et le clan McGarrigle. « Mais pour bien accueillir le public et pour mieux faire connaître l’école, et tant qu’à avoir des grands noms, il fallait que ce soit dans une grande salle et avec les élèves. »

Depuis quelques mois, Martha répète avec les élèves quelques chansons, dont Losing My Religion, de R.E.M., All Apologies, de Nirvana, et Le blues du businessman, tirée de la comédie musicale Starmania. Pendant la répétition à laquelle nous avons assisté, les jeunes devaient maintenant apprivoiser les harmonies vocales de Réverbère, d’Ariane Moffatt, et de Rien à faire, de Marie-Pierre Arthur.

« Peut-être que nous pourrions ajouter du Ferland ? », a lancé Martha, d’autant qu’Ariane est en train de monter le spectacle en hommage au petit roi qui sera présenté aux Francos le 18 juin.

Le spectacle-bénéfice est l’occasion de faire connaître davantage l’Académie Centennial, qui accueille des élèves dont le TDAH, la dysgraphie, la dyslexie ou tout autre défi comme l’anxiété compliquent l’apprentissage.

« L’école n’est plus subventionnée pour le volet francophone. C’est pourquoi c’est encore plus important pour nous d’être là », souligne Marie-Pierre Arthur, dont le fils Leopold y étudie en 2e secondaire.

« Les parents ne sont pas toujours les bonnes personnes pour aider leur enfant à apprendre », souligne la mère d’un fils anxieux de nature, mais heureux de pouvoir aller à l’école tout en étant comédien, notamment dans la série Sorcières.

« Après l’école primaire de mon fils, nous n’avions pas beaucoup de choix, se remémore pour sa part Martha Wainwright. C’est en faisant des recherches que j’ai appris que Centennial existait. »

Apprendre autrement

Martha Wainwright souligne que l’Académie Centennial accueille beaucoup d’enfants « qui tombent dans les craques ». Leurs difficultés sont trop grandes pour l’école publique traditionnelle, mais pas assez pour d’autres comme Vanguard.

« Tous nos élèves ont la capacité d’apprendre et d’avoir leur diplôme en cinq ans. C’est juste qu’ils ont besoin de beaucoup d’encadrement et d’une structure d’enseignement différente », explique le directeur adjoint Marco Palmieri. Quand il était élève à l’Académie Centennial, il souffrait lui-même d’un grand manque de confiance en soi.

« Comme je dis toujours, je n’ai jamais vraiment quitté Centennial », lance celui qui a fait son secondaire là où il allait plus tard enseigner pendant 16 ans avant d’assister celle qui était sa directrice à l’époque, Angela Burgos.

La méthode pédagogique de l’Académie Centennial repose sur la « conception universelle d’apprentissage ». En d’autres mots, ce qui est bon pour un élève est bon pour le groupe : personne n’est en retrait ou ne bénéficie d’un traitement particulier.

Le directeur adjoint souligne que 80 % des élèves de Centennial obtiennent leur diplôme en cinq ans alors que la moyenne nationale est de 40 % chez les élèves en difficulté d’apprentissage. « On donne espoir aux élèves et aux familles. »

Un manque à gagner

L’Académie Centennial existe depuis 1969, mais elle n’accueille des jeunes au cheminement scolaire francophone que depuis 2016. Aujourd’hui, ces derniers représentent près de la moitié des 320 élèves, mais le gouvernement a mis fin à leur subvention (de quelque 5000 $ par tête) alors que le secteur anglophone est toujours financé. En résumé, le Ministère considère qu’il s’agit d’une nouvelle école et non que Centennial offre dorénavant un enseignement dans les deux langues. Or, cela représente un manque à gagner d’environ 1 million de dollars. Et bien des parents font déjà d’énormes sacrifices pour payer les frais de scolarité de… 22 000 $.

Quand Elisa Schwarz a entendu parler de l’Académie Centennial, son fils de 3e secondaire était « perdu dans le système ». Sa première réaction fut de se dire que ce n’était « pas réaliste », financièrement parlant. « J’ai des frissons juste à y repenser, mais, après avoir visité l’école, je me suis dit : “On va faire tout ce qu’il faut pour que ça marche.” »

Et cela a marché ! Son fils s’est même découvert un intérêt pour les mathématiques. Vendredi prochain, c’est sa cérémonie de remise des diplômes, s’émeut sa mère. « Il va finir son secondaire en cinq ans et il a été accepté au cégep de Rosemont. »

Quand le fils de Karine Sigouin a pour sa part fait son entrée à la polyvalente en septembre dernier, sa mère s’est sentie « complètement abandonnée », surtout quand on lui a dit que Théo devrait peut-être déjà envisager de faire un DEP.

« J’avais peur de l’échapper », confie la Lavalloise qui est loin d’avoir une fortune pour absorber des frais de scolarité. Mais des mois plus tard, elle ne regrette rien.

Les parents se sentent aussi moins seuls. « Je me souviens encore du premier BBQ où j’étais avec d’autres qui vivent la même chose que moi. »

Conclusion de Martha Wainwright ? « Le Québec a besoin de Centennial et Centennial a besoin du soutien du Québec. »

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